Je laissais mes compagnons s'afférer à ranger notre camp en vue de notre retour à Ruswold. Je profitais de cet instant de solitude et de tranquillité pour rédiger mon courrier. De mes quatre années passées à la Tour du Cercle, période de ma jeunesse que je m’efforçais de classer dans la plus profonde oubliette de ma mémoire, je ne pouvais nier avoir acquis une certaine aisance dans le maniement de la plume. Mais un premier obstacle entravait ma volonté ; notre campement ne comptait ni table ni chaise, instruments indispensables pour l’écrivain. Pour combler cette faille logistique, je m’assis à même le sol, le dos dressé le long d’un large tronc, les genoux pliés, les cuisses jointes formant un simulacre de table. Je posais délicatement l’encrier à mes cotés et calais la tablette supportant la feuille vierge le long du bureau de chair. La plume à dextre, il ne me restait plus qu’à jouer des pleins et déliés. Aucune phrase, aucun mot prit vie sur la feuille de papier immaculée. Car voyez-vous, écrire des essais philosophiques ou des allégories sur les bienfaits du Créateur ne vous prépare en rien au délicat exercice de la rédaction d’une missive convaincante et pertinente demandant à un chevalier unijambiste, déshonoré et ruiné de porter secours à une bande de quatre inconnus en soif d’aventure plongée dans une situation où survivre devient l’enjeu. Ce manque de culture me coûta la moitié de ma réserve d’encre, douze feuilles transformées en boulettes qui meublaient la périphérie de mon dossier en bois naturel, et une plume à retailler. De tout ce gâchis, j’en tirais ceci.
Sir Valdur Krole,
En premier lieu, je vous présente mes excuses pour ma conduite qui s’écarte des règles de bienséances et passe outre le protocole auquel je devrais me plier devant un homme de votre rang. Malheureusement, les circonstances m’obligent à utiliser la plume alors qu’un entretien s’impose. Je reste convaincu que, en lisant la suite de cette discourtoise missive, vous saurez me pardonner. Car, en plus de vous apprendre que vous êtes victime d’une démoniaque machination, je puis vous prouver que de mauvais sujets s’en prennent à votre vie de manière insidieuse et lâche. Quoi de plus couard que de détruire vos convois de ravitaillement, et vous condamner vers une inexorable et lente famine. Vos ennemis se cachent derrière un assassinat maquillé, évitant ainsi un noble affrontement qui leur serait bien plus dangereux.
Quelle preuve m’autorise à porter ses accusations ? N’attendiez-vous pas un convoi de ravitaillement ? Celui-ci n’aurait-il pas quelque retard ? Sachez qu’il n’arrivera jamais à destination. Il a été sauvagement brulé sur la voix qui relie votre manoir à Logerswold le jour même où avec mes compagnons nous quittions votre noble demeure. Nous sommes parvenus devant le chariot en combustion, et n’avons pu sauver ni les biens devenus des amas de cendres rougissantes, ni les convoyeurs atrocement exécutés. Mais l’ignominie était récente. A notre arrivée inopinée, les malfaisants s’apprêtaient à quitter le lieu pour rendre compte. De compte, ils ne purent rendre. Maigre vengeance, je vous l’accorde, le commanditaire court toujours, je l’avoue. Aussi, j’ai davantage à vous proposer pour assouvir votre peine. Je détiens la possibilité de retrouver le titre de ban qui vous a été honteusement dérobé. Mais l’affaire n'est pas sans risque. La bête est blessée, assoiffée de haine funeste, et d’autant plus redoutable. Venez au plus vite nous rejoindre à Logerswold. Rejoignez-nous en chevalier armé prêt à livrer dur combat, accompagné de la meilleure escorte qu’il vous sera possible de rassembler ; la bête n’agit pas seule, grande sera la bataille.
Comme pour tout aventurier, sans doute supposez-vous que je possède quelque intérêt à votre venue. En réalité, il n’est autre que le vôtre : arrêter le fléau qui sous de lâche traîtrise se nourrit du sang de la vallée de Ruswold en semant la discorde et le meurtre, l’arrêter avant qu’il ne puisse s’étendre à tout Férelden réduisant notre beau pays prospère à un désert sans vie. Aussi, notre récompense, nous serons la partager en proportion de la satisfaction du devoir accompli.
Je sais compter sur votre gratitude.
Votre dévoué Rylan de Malgranne, Apprenti Voyageur, Initié du Cercle.
Il me restait en arrivant au village de Logerswold, à retrouver Ridyck le garant des écuries, et à le convaincre de livrer sans attendre ma missive à son ancien maître. Mais je n’étais pas certain que les circonstances me le permettent, ni que l’écuyer parviendrait à temps au manoir de Krole. Je priais le Créateur qu’il me soutienne dans ce combat.
Sir Valdur Krole,
En premier lieu, je vous présente mes excuses pour ma conduite qui s’écarte des règles de bienséances et passe outre le protocole auquel je devrais me plier devant un homme de votre rang. Malheureusement, les circonstances m’obligent à utiliser la plume alors qu’un entretien s’impose. Je reste convaincu que, en lisant la suite de cette discourtoise missive, vous saurez me pardonner. Car, en plus de vous apprendre que vous êtes victime d’une démoniaque machination, je puis vous prouver que de mauvais sujets s’en prennent à votre vie de manière insidieuse et lâche. Quoi de plus couard que de détruire vos convois de ravitaillement, et vous condamner vers une inexorable et lente famine. Vos ennemis se cachent derrière un assassinat maquillé, évitant ainsi un noble affrontement qui leur serait bien plus dangereux.
Quelle preuve m’autorise à porter ses accusations ? N’attendiez-vous pas un convoi de ravitaillement ? Celui-ci n’aurait-il pas quelque retard ? Sachez qu’il n’arrivera jamais à destination. Il a été sauvagement brulé sur la voix qui relie votre manoir à Logerswold le jour même où avec mes compagnons nous quittions votre noble demeure. Nous sommes parvenus devant le chariot en combustion, et n’avons pu sauver ni les biens devenus des amas de cendres rougissantes, ni les convoyeurs atrocement exécutés. Mais l’ignominie était récente. A notre arrivée inopinée, les malfaisants s’apprêtaient à quitter le lieu pour rendre compte. De compte, ils ne purent rendre. Maigre vengeance, je vous l’accorde, le commanditaire court toujours, je l’avoue. Aussi, j’ai davantage à vous proposer pour assouvir votre peine. Je détiens la possibilité de retrouver le titre de ban qui vous a été honteusement dérobé. Mais l’affaire n'est pas sans risque. La bête est blessée, assoiffée de haine funeste, et d’autant plus redoutable. Venez au plus vite nous rejoindre à Logerswold. Rejoignez-nous en chevalier armé prêt à livrer dur combat, accompagné de la meilleure escorte qu’il vous sera possible de rassembler ; la bête n’agit pas seule, grande sera la bataille.
Comme pour tout aventurier, sans doute supposez-vous que je possède quelque intérêt à votre venue. En réalité, il n’est autre que le vôtre : arrêter le fléau qui sous de lâche traîtrise se nourrit du sang de la vallée de Ruswold en semant la discorde et le meurtre, l’arrêter avant qu’il ne puisse s’étendre à tout Férelden réduisant notre beau pays prospère à un désert sans vie. Aussi, notre récompense, nous serons la partager en proportion de la satisfaction du devoir accompli.
Je sais compter sur votre gratitude.
Votre dévoué Rylan de Malgranne, Apprenti Voyageur, Initié du Cercle.
Il me restait en arrivant au village de Logerswold, à retrouver Ridyck le garant des écuries, et à le convaincre de livrer sans attendre ma missive à son ancien maître. Mais je n’étais pas certain que les circonstances me le permettent, ni que l’écuyer parviendrait à temps au manoir de Krole. Je priais le Créateur qu’il me soutienne dans ce combat.
Autobiographie de Rylan : la lettre à l'attention de Valdur Krole
Texte de Marcapuce